Dirigé par le jeune banquier ivoirien Jean-Luc Konan, le Groupe Cofina (Compagnie financière africaine), spécialisé dans la mésofinance, vient d’ouvrir ses portes à Paris.
Son représentant, Marc Konan, nous explique les enjeux de sa mission et pourquoi Cofina s’intéresse tant aux diasporas africaines établies en France et en Europe.
Pouvez-vous nous présenter brièvement le Groupe Cofina ?
Marc Konan :
Le Groupe Cofina a été fondé en 2013 et son Président directeur général (PDG) est Jean-Luc Konan. C’est un banquier de formation qui a été formé en France, où il a débuté sa carrière en tant qu’auditeur chez Arthur Andersen avant de travailler pour de prestigieuses institutions bancaires, en l’occurrence BNP Paribas, Citibank, Barclays, Ecobank, UBA (…) Nous avons démarré nos activités dans un premier temps en Guinée Conakry avant de nous étendre en Côte d’Ivoire, au Sénégal, au Mali, au Burkina Faso, en République démocratique du Congo, au Gabon et très bientôt au Togo, où nous sommes en attente de notre agrément. Comme vous pouvez le constatez, nous sommes présents dans huit pays africains et maintenant en France.
« Notre objectif à court terme est de devenir le leader sur ce marché en Afrique »
Quelle est votre feuille de route ?
Le rôle de Cofina France est de servir de vecteur de croissance du Groupe Cofina en Afrique. Je devrais rappeler que notre objectif, à court terme, est de devenir le leader sur le marché de la mésofinance en Afrique. Mais qu’est-ce c’est que la mésofinance ? En économie financière, il y a la finance classique et donc les banques classiques habituelles, et la microfinance. Nous avons constaté qu’il y a un chaînon manquant. C’est-à-dire une offre qui se situe à mi-chemin de la banque classique et de la microfinance. Autrement dit, une part de marché qui concerne des entreprises ou des entrepreneurs qui sont trop petits pour les banques classiques, mais trop grands pour la microfinance. Le Groupe Cofina a fait le choix d’accompagner cette catégorie d’entrepreneurs dans son développement en Afrique.
En France, nous avons aussi noté que les diasporas africaines correspondent, tout à fait, à ce type de clients. Nous proposons entre autres des solutions et produits innovants dans les pays d’origine. C’est seulement depuis un an que nous avons décidé d’installer une représentation à Paris. Nous avons obtenu notre agrément d’agent de paiement auprès de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), l’organe de supervision français de la banque et de l’assurance. Depuis lors, nous sommes autorisés à collecter des fonds des diasporas et de les transformer en investissements. Cofina Services France a officiellement ouvert ses portes en novembre 2019.
Quelles sont les conditions requises pour ouvrir un compte ?
Le client se présente tout simplement au siège de Cofina Services France situé au numéro 9 de l’avenue Corentin Cariou (dans le 19ème arrondissement de Paris) muni de sa carte nationale d’identité du pays d’origine ou de son passeport, d’un justificatif de domicile ou d’une attestation d’hébergement et de deux photos d’identité. Sans plus. Le compte ouvert à Paris est aussi valable à l’agence Cofina du pays d’origine du souscripteur.
Quels produits proposez-vous sur un marché très disputés par d’autres établissements concurrents ?
Cofina Services Paris propose un pack diaspora qui comprend le compte d’épargne et compte courant, les dépôts à terme pour rémunérer l’épargne dans les pays où le Groupe Cofina est présent. Nous proposons également des services associés, tels que des mises à disposition de fonds pour des tiers restés au pays, des produits d’assurance en cas de décès notamment pour le rapatriement de corps. Nous proposons aussi de l’accompagnement en terme de crédit immobilier. Ce dernier produit interviendra dans un deuxième temps de notre développement en France.
Qu’en est-il des moyens de paiement et des frais inhérents ?
Les cartes visa prépayées, la mise à disposition de fonds, les virements et l’établissement de chèque constituent les principaux moyens de paiement. Pour ce qui est des frais, le montant imposé par Visa international s’élève à 3,80 euros par retrait hors zone Uemoa (Union économique et monétaire ouest-africaine). Néanmoins, il faut ajouter que nous autorisons des retraits de dépannage jusqu’à trois fois 500 euros par mois à nos guichets à Paris, sans frais.
Comment le client suit-il les opérations sur son compte ?
Le client dispose d’une application mobile ou sur un ordinateur qui lui permet de consulter de manière quasi permanente les mouvements sur son compte. Cette application lui permet aussi de faire des virements et même de remettre de l’espèce à ses proches au pays. Un de nos enjeux est de collecter les fonds des diasporas de façon sécurisée pour que ceux-ci soient disponibles à tout moment pour elles ou pour leurs proches dans les pays d’origine.
« Nous avons démarré avec un produit d’assurance décès simple »
Pouvez-vous nous en dire davantage sur l’assurance décès qui constitue une des préoccupations des diasporas qui se ruinent le plus souvent pour rapatrier les corps des proches ?
C’est tout à fait exact. Effectivement, lors de nos enquêtes auprès des diasporas, nous avons constaté qu’il y a principalement deux offres qui les intéressent en priorité. La première est l’immobilier. Toutes les personnes que nous avons interrogées souhaitent investir dans l’immobilier de façon sécurisée. C’est pourquoi nous voulons organiser une rencontre entre nos clients, les promoteurs immobiliers et les notaires. La deuxième préoccupation, c’est le problème du décès qui constitue un véritable casse-tête pour les communautés de la diaspora. A Cofina Services France, nous proposons une assurance décès et rapatriement qui ne coûte que 38 euros annuel pour bénéficier de garanties jusqu’à hauteur de dix mille euros. En cas de décès du souscripteur, nous couvrons les frais de conservation du corps en France, le rapatriement du corps de la France vers le pays d’origine, la conservation du corps dans le pays d’origine et le transfert du corps vers le lieu de l’inhumation. Face à la forte demande, nous sommes en train d’étudier la possibilité d’élargir cette assurance, en fonction des formules choisies, bien sûr, aux membres de la famille du souscripteur restés au pays. Nous comptons apporter très rapidement une réponse adéquate. Dans un premier temps, nous avons fait le choix de démarrer avec un produit d’assurance décès simple. Comme vous pouvez le constater, notre agilité nous permet de nous adapter aux demandes de nos clients.
Quels sont les autres produits prisés par les diasporas ?
Les diasporas envoient régulièrement de l’argent dans leur pays d’origine. Cependant, elles souhaitent épargner également. Le problème auquel elles sont confrontées, c’est que les fonds envoyés ne sont pas toujours utilisés aux fins qu’elles auraient souhaitées. Alors, nous leur proposons, comme solution, d’envoyer ces fonds sur leur propre compte, dont elles ont l’entière gestion. A titre d’exemple, une personne qui envoie la somme de cinq mille euros, ne paie que dix euros de frais. Les fonds envoyés sont disponibles, en temps réel, sur le compte de l’épargnant dans son pays d’origine. Nous avons démarré ces opérations dans un premier temps au Sénégal, en Côte d’Ivoire et au Mali. Elles seront élargies à l’ensemble des pays où nous sommes présents.
Les frais de transferts d’argent vers l’étranger pratiqués par les entreprises spécialisées concurrentes sont jugés trop élevés. Que propose Cofina Services France ?
Plutôt que de parler de concurrents, je dirai que ce sont des services complémentaires. La catégorie de clients qui envoie de l’argent via les services des sociétés spécialisées comme vous le dites, le fait pour un besoin ponctuel, voire le plus souvent pour des besoins alimentaires. Ce n’est pas la même catégorie de personnes qui s’adresse à Cofina Services. Celle-là s’adresse à nous pour épargner son argent dans son pays d’origine et éventuellement pour investir. La première étape que nous conseillons à nos clients, c’est d’épargner leur argent en toute sécurité chez Cofina Services. Une fois que le client a constitué sa base d’épargne, il peut ensuite nous solliciter pour l’accompagner dans les investissements de son choix. Notre rôle c’est de l’encadrer, de sécuriser ses fonds envoyés et de faire en sorte qu’il soit, in fine, satisfait.
« En moins de 5 ans, notre Groupe a pu financer un peu plus de 70 000 projets en Afrique »
Finalement qu’est-ce qui vous démarque des autres ?
Nous nous démarquons surtout par notre réactivité. Nous sommes une entreprise agile composée de jeunes. De ce fait, les chaînes de décisions sont plus courtes. En moins de cinq ans, le Groupe Cofina a pu financer un peu plus de 70 000 projets en Afrique. Un de nos atouts, c’est notre capacité à pouvoir travailler avec des personnes même moins structurées en comparaison aux exigences des banques classiques.
Autre chose à savoir, c’est bien entendu le coût de nos offres. Par exemple sur les rémunérations des comptes d’épargne, nous sommes plus avantageux que les banques classiques. Il y a zéro euro de frais de tenue de compte. Et ce n’est pas tout. Sur les comptes d’épargne, le taux de rémunération est autour de 3,5 %. Nous proposons des solutions à 4 % en fonction de la durée du dépôt du client. Ces taux peuvent monter jusqu’à 5 et 7 % de rémunération annuelle en fonction des pays et des montants. Croyez-moi, pour un compte qui offre toutes ces possibilités, à savoir la consultation, la mise à disposition, le virement, l’émission de chèque, vous ne trouverez pas mieux ailleurs.
Après Paris, envisagez-vous vous implanter dans d’autres capitales européennes ?
Bien sûr. A terme, nous ne comptons pas nous limiter à la France. Il fallait commencer quelque part. Nous avons fait le choix d’ouvrir une représentation en France où est établie, selon les chiffres, la majorité des populations de la zone Uemoa. Après Paris, nous allons étendre nos représentations partout où résident nos diasporas pour leur expliquer qu’il est possible d’investir de façon sécurisée en Afrique et de préparer son avenir à partir du pays d’accueil grâce à Cofina Services. Au-delà du caractère commercial de nos activités, notre rôle est aussi de donner de l’espoir à tous ces jeunes Africains qui risquent leur vie par la traversée périlleuse du désert et de la Méditerranée. Nous devons pouvoir leur dire qu’il est possible de réussir sur le Continent. Au lieu qu’ils investissent leur capital dans des voyages très périlleux vers l’Europe, nous demandons à ces jeunes de s’adresser à Cofina. Nous avons des solutions pour eux.
Pensez-vous que le changement de la monnaie – en l’occurrence le remplacement du Franc Cfa par l’Eco – aura un impact sur vos activités ?
La réponse à cette question pourrait être apportée plutôt par nos gouvernements et notre Banque Centrale. Au regard des premières déclarations qui ont été faites, il semble qu’il n’y aura pas de changement fondamental. Chez Cofina, nous restons donc confiants et à l’écoute des décisions qui seront prises.
Propos recueillis par Clément Yao.
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